« La situation de la classe ouvrière est la base réelle d'où sont issus tous les mouvements sociaux actuels parce qu'elle est en même temps la pointe extrême et la manifestation la plus visible de la misérable situation sociale actuelle. La connaissance des conditions de vie du prolétariat est une nécessité absolue si l'on veut assurer un fondement solide aux théories socialistes aussi bien qu'aux jugements sur leur légitimité, mettre un terme à toutes les divagations et affabulations fantastiques…»
(Friedrich Engels – La situation de la classe laborieuse en Angleterre,1845)

D’OÙ VENONS NOUS

MC a été créé en 1988 par la fusion de deux composantes : la première, présente en Belgique, fruit d’une critique radicale de l’idéologie ultragauche, l’autre, présente en France, issue de l’expérience opéraïste italienne. Les deux premières années d'existence de MC ont été consacrées au travail de réappropriation des concepts marxistes, alors que la théorie communiste est toujours plongée dans une crise profonde. Cette crise est le fait de sa dénaturation (collaboration de classe ; nationalisme ; parlementarisme ; pacifisme ; syndicalisme) opérée avant tout, au fil des décennies, par les courants sociaux-démocrates, staliniens, maoïstes et trotskystes. Dans les années qui ont suivi, tout en maintenant l’étude et l’application des concepts marxistes à l’analyse du réel, le groupe s’est engagé sur le terrain des grèves qui, en France et en Belgique, avaient alors ébréché la paix sociale. MC est intervenu dans la lutte à Air France d'octobre 1993, dans celles de plusieurs usines (notamment, Renault-Flins, et LU-Belin d’Evry) du printemps 1995, dans le mouvement des salariés du secteur public en France de novembre-décembre de la même année ainsi que dans la bataille contre la fermeture de Renault-Vilvoorde en Belgique.

MAINTENANT…

Notre principal objectif politique pour la phase présente consiste à travailler à la constitution de formes élémentaires organisées de l’indépendance politique de la classe ouvrière. La formalisation d’un réseau initial d’organismes de cette nature – produits de la radicalisation politique des combats défensifs – nous apparaît comme la condition principale à la constitution d’une organisation politique prolétarienne. L’apparition de ces comités politiques représenterait le début du processus de consolidation de la conscience révolutionnaire de secteurs prolétariens avancés. Une telle minorité ouvrière organisée, forgée au combat de classe et rompue à l’affrontement avec les partis et syndicats de toutes obédiences représentant la Gauche du capital, dans une recherche permanente de l’autonomie ouvrière, aurait un impact significatif dans le processus de la renaissance du mouvement ouvrier indépendant.

Notre rôle dans ce processus consiste à défendre politiquement et théoriquement cette perspective et, au moyen de l’intervention dans les conflits de classe, à contribuer à l’accroissement de la capacité collective à comprendre et critiquer les termes réels de l’affrontement. Pour cela, nous nous prévalons de deux instruments majeurs :

1) La critique concrète du capital et de son mouvement réel, réalisée au moyen d’une application rigoureuse mais non dogmatique des catégories élaborées par Marx et Engels de critique de l’économie politique.

2) L’enquête ouvrière comme méthode utile, tout à la fois, à la connaissance la plus détaillée possible des mille facettes de l’exploitation, de la composition organique de la classe exploitée et de la perception que cette dernière a de sa propre condition. L’enquête ouvrière, lorsque les prolétaires se l’approprient, devient un outil d’organisation et de prise de conscience.

Comme toute formation communiste digne de cette appellation, MC travaille à son propre dépassement dans une vaste et solide organisation politique ouvrière centralisée capable de capitaliser et démultiplier les énergies destructrices dégagées par les luttes de classe. MC se bat pour que les révolutionnaires développent le maximum de centralisation et d’unité politique afin de les mettre au service de la formation du parti prolétarien.

ET APRÈS ?

Hier comme aujourd’hui, la finalité de toute organisation politique indépendante ouvrière est la mise à mort des sociétés divisées en classes. Cette libération ne peut être que le fruit mûr d’un long et ample mouvement prolétarien, pleinement déployé dans les principaux pays capitalistes et capable d’investir l’ensemble de la société. L’apport révolutionnaire des masses de la petite paysannerie pauvre de la périphérie du capitalisme est également essentiel à l’achèvement de cette ambitieuse œuvre historique. Ces masses de déshérités de la campagne ont tout intérêt à s’unir à la classe ouvrière car, seules, elles ne parviendront pas à s’émanciper définitivement du joug de misère qui les tenaille depuis des centaines d’années.

De même, il faudra compter sur celui des secteurs de la société qui, même lorsqu’ils ne sont pas directement soumis à l’exploitation en tant que tels, font l’objet des innombrables oppressions produites par la succession des modes de production fondés sur la division en classes. Nous pensons avant tout aux femmes, engagées dans un combat plurimillénaire de destruction de la suprématie du mâle. Elles constituent à coup sûr un facteur social essentiel de la révolution prolétarienne à venir. Ces différentes composantes de la société du capital et d’autres encore (dont plusieurs minorités nationales et religieuses opprimées) ont un intérêt commun à celui des ouvriers révolutionnaires : mettre un terme à des rapports sociaux profondément injustes ; en finir avec des structures archaïques désormais dépassées par les immenses forces productives que la coopération sociale a engendré au cours des siècles.

Le capitalisme, stade ultime des sociétés divisées en classes, n’est plus à la hauteur de l’énorme richesse humaine potentielle contenue dans la société qu’il domine. Hier comme aujourd’hui, l’État (tous les États) est la pire expression de la dictature des classes possédantes. L’une de ses verrues les plus anachroniques et douloureuses, celui-ci ne reste pas moins l’un des instruments les plus essentiels de sa survie. L’Etat (tous les Etats) doit donc être considéré comme l’ennemi principal du mouvement ouvrier indépendant. L’Etat (tous les Etats) doit disparaître, emporté par l’océan en tempête de la lutte de classe.

Le communisme comme mouvement réel n’est que le processus organisé et centralisé de dépassement du capital dans toutes ses formes, le mouvement de transition à une société sans classes. En tant qu’état, le communisme, dans sa phase initiale d’existence, démonte l’Etat et remplace l’organisation sociale qui procède de ce dernier par la libre association des forces sociales intéressées au processus de dissolution des rapports de production basés sur le salariat, le servage et l’esclavage. Ces forces sociales enfin libérées exalteront et multiplieront les parcours de liberté, y compris individuelle. L’individu aura enfin la possibilité concrète de se réconcilier avec sa nature sociale.

Mais, pour l’heure, maximum d’intransigeance vis-à-vis des classes représentées par le régime actuel et maximum de liberté et d’auto-organisation au sein de celles qui engageront le combat pour un avenir collectif et individuel qui vaut la peine d’être vécu. Voilà résumés notre ambition et notre espoir.


Bruxelles-Paris, juin 2005.